samedi 26 avril 2008

l'île aux lépreux


Les gens d’ici ne parlent pas, ils ont les gestes rares et le regard très pénétrant. Vêtue de rouge dans un pays de deuil, ce fut Maria qui me servit, sur la terrasse. Le miel avait saveur de sauge et coulait, transparent, sur le fromage maigre. J’étais heureux, au bout du monde, sûr d’être seul à savourer des heures qui passaient lentement et je restai longtemps à regarder la mer qui, peu à peu, virait.
Le soir, face au village, l’île se compliquait d’architectures nouvelles, comme de temples effondrés, nichés au flanc de la montagne. De loin, il semblait y régner un silence que la lumière filtrait, des cavernes s’y creusaient, de plus en plus profondes, puis elles disparaissaient et dans l’obscurité, sur les rochers, on n’entendait que le chuintement de la mer.
Au matin, l’île apparaissait autre, ouverte sans surprise à l’aplomb du soleil, relief brouté de pierres où la végétation rampait. Hérissée de hauts murs, elle était immobile et allongée sur l’eau, comme un grand monstre glabre, le temps l’avait décapitée et son crâne gisait, séparé par les vagues, un peu plus vers le large. Il était blanc, couvert de croûtes d’argile semblables à des ruines. C’était l’Ile aux Lépreux.
extrait de l'Ile aux Lépreux, nouvelle, MD.
Huile sur papier toile. 15x40

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